Quand la dette d'un Etat est elle considérée soutenable ?
Here is my weekly question on France Info (aired on March 18).
Quand la dette d'un Etat est elle considérée soutenable ?
quand elle est remboursable
quand elle est constante
quand elle croît aussi vite que le Produit Intérieur Brut
La réponse est quand elle croît aussi vite que le Produit Intérieur Brut (PIB).
La dette peut être soutenable même si elle croît ?
En effet elle n’a pas besoin de se réduire ni même d’être constante pour être soutenable. Pour bien le comprendre il faut se souvenir que le PIB ne correspond pas – contrairement à ce qui est souvent dit – à la richesse du pays mais à ce qu’il produit en une année.
Quelle est la différence ?
Le PIB c’est comme le revenu d’une personne, ce qu’elle gagne par an. La richesse est ce qu’elle possède. Ainsi lorsqu’on souscrit un emprunt immobilier auprès d’une banque, celle-ci essaie d’évaluer notre capacité de remboursement en fonction de nos revenus (en général pour que les remboursements mensuels ne dépassent pas 30% du salaire). On peut donc emprunter même si on ne possède aucun bien, c’est notre revenu qui nous permet de rembourser. Pour la France, la tour Eiffel fait partie de ce qu’elle possède, sa richesse, mais ce sont les revenus qu’elle en retire grâce au tourisme qui font partie du PIB.
Mais dans ce calcul de notre solvabilité, on ne se dit pas que la dette doit représenter un tiers du revenu, ce sont simplement les remboursements qui sont calculés en fonction du revenu. Sinon on ne pourrait jamais rien emprunter.
Pourtant dans les critères de Maastricht, c’est bien la dette qui ne doit pas dépasser 60% du PIB, du revenu donc.
Car contrairement à un individu, un pays est en principe immortel. Il sera donc toujours là pour payer les intérêts de la dette, même si cela prend du temps et qu’il rechigne à le faire comme dans le cas des fameux emprunts russes de la fin du XIXe siècle qui n’auront été que partiellement honorés en 2000. Etant intemporel, un Etat pourra donc a priori toujours emprunter. Il n’a donc pas besoin de rembourser intégralement sa dette. Il faut simplement que le coût annuel n’augmente pas plus vite que son PIB.
Et c’est le cas ?
Malheureusement non, depuis la Présidence Giscard d’Estaing, la dette est passée de 20% du PIB à plus de 90%. Elle n’est donc pas sous contrôle. Pourtant on a vu pire dans le passé, avec une dette qui a beaucoup fluctué, quasi nulle en 1820, près de 300% du PIB en 1921 et 1945 à cause des dépenses liées aux guerres mondiales. Le pourcentage s’est réduit rapidement pendant les 30 glorieuses parce que la croissance économique était très forte ainsi que l’inflation.
Mais alors le critère de Maastricht de 60% indique-t-il le niveau de soutenabilité ?
C’est dans ce but qu’il a été instauré avec en complément une limite de 3% du déficit public qui avait été fixé selon des hypothèses de croissance du PIB et d’inflation qui correspondaient aux années 1990. On n’est malheureusement plus dans ce cas aujourd’hui et la politique de réduction du déficit a réduit encore davantage le PIB. C’est ce phénomène qui a fait que malgré les efforts budgétaires, la dette Grecque s’est envolée car le PIB s’est beaucoup contracté. Le Gouvernement Grec propose de modifier sa dette de sorte que ses remboursements dépendent de sa croissance, cela faciliterait la stabilisation.
Il est d’ailleurs intéressant que parmi ses propositions, le gouvernement Grec suggère également des emprunts perpétuels, c’est à dire dont il paie les intérêts mais ne rembourse jamais le principal, si l’Etat honore ces paiements jusqu’à la fin des temps, cela peut être très rentable pour ses créditeurs !